Salutations citoyens ! Dans cet article, nous allons aborder un sujet de fond qui commence à me fatiguer : Les tensions dans le fandom Star Wars.
Échanger son point de vue et « vivement » débattre est inhérent aux communautés de fans. Mais lorsqu’on s’écharpe pour tout et n’importe quoi, au point que les médias généralistes s’en mêlent… C’est qu’on a dépassé les limites.
Les raisons de la discorde
Le fandom Star Wars est divisé (c’est rien de le dire) depuis le rachat de Lucasfilm par Disney et plus précisément depuis la sortie du Réveil de la Force sur les écrans. Rogue One avait calmé le jeu, mettant à peu près tout le monde d’accord sur ses qualités.
Puis, un beau jour de décembre 2017 arrive Star Wars VIII – Les Derniers Jedi… et là, c’est la crise. Une crise qui frôlera l’hystérie collective !
Tout le monde s’entre-déchire sur ce film. Les détracteurs sont d’une rare violence… Parfaitement contrebalancée par ceux qui l’ont apprécié, tout aussi agressifs ! Personne ne mâche ses mots, traitant celui qui n’est pas de son avis de tous les noms.
Une honte pour tout le fandom, il n’y a pas d’autre mot.
Mais cette réaction était tout de même prévisible. Ce film a fait des choix radicaux. Et on ne fait jamais d’omelette radicale sans casser des œufs. Mais l’emballement, qu’il soit médiatique ou au sein même du public lui a donné une proportion assez mémorable, encore aujourd’hui.
Entre les réactions de rejet de certains, la déception d’autres, la pétition (lancée par un seul et unique fan contrairement à ce qui est dit partout), l’engouement d’une autre partie du public et enfin certains qui ne sont pas convaincus mais veulent défendre Star Wars au sens large… les points de vues sont très nombreux et s’entrechoquent tous dans une violence verbale assez impressionnante.
Cassons ces faux arguments qu’on entend trop souvent
Je ne compte plus les faux arguments balancés à la tronche de celui d’en face, peu importe son camp. Ils sont très souvent inexacts ou biaisés. Chacun tire dans tous les sens, sans se soucier des faits. Je pourrai en lister une vingtaine, mais voici ceux qui reviennent le plus souvent :
- Disney n’y est pour rien, c’est Lucasfilm qui est responsable : Faux
Disney n’est pas un simple « investisseur » possédant Lucasfilm. La société est également productrice et a donc le final cut et son armée de « producteurs exécutifs » pour veiller au grain. ils sont présents de la préproduction au montage, en passant par le tournage. Rien ne sort sans la bénédiction du producteur. C’est ainsi qu’Hollywood fonctionne depuis toujours, ça n’a rien de nouveau. C’est d’ailleurs pour cette raison de Georges Lucas a créé Lucasfilm puis le Skywalker Ranch.
- Georges Lucas n’avait pas de scénarios pour la Postlogie, il a fallu tout inventer : Faux.
Les grandes lignes étaient prêtes… et ont été vendues à Disney avec Lucasfilm. Il avait même approché Mark Hamill et Carrie Fisher pour préparer ces films avant la vente. Ces derniers n’en ont juste pas tenu compte, reprenant simplement quelques éléments de décor (planètes, etc.).
- L’univers étendu fourmille de bons récits à adapter au cinéma : Vrai et Faux.
L’univers étendu contient beaucoup de très bons récits… et au moins autant de mauvais, il faut l’admettre. Et Georges Lucas lui-même n’a jamais adapté la moindre ligne de l’UE au cinéma, à un ou deux éléments près tels que Coruscant.
- Le film ne correspond pas à ce qu’attendaient les « fans », du coup ils râlent : Faux
Pour affirmer cela, il faut connaitre la personne et ses attentes autour du film, sinon ça n’a aucun sens. Personnellement, j’aime beaucoup les Sherlock Holmes de Guy Ritchy. Pourtant, sa vision ne correspond pas du tout à la mienne concernant l’oeuvre de Conan Doyle (qui me passionne) et je ne m’attendais clairement pas à ça en allant voir le premier. Personnellement, je vais voir un Star Wars avec l’esprit grand ouvert, prêt à tout voir et découvrir. C’est le cas de beaucoup de gens.
- Disney voulait rembourser sa mise en faisant un film rapidement : Faux
Disney avait déjà amorti la mise avec les produits dérivés et la gestion des droits de la licence bien avant la sortie de Star Wars 7. Mais le film est effectivement sorti dans une grande urgence… Dans l’idée de toucher le jackpot pour les fêtes de fin d’année.
- Star Wars était au point mort avant le rachat de la franchise : Faux
De multiples projets fourmillaient… et Georges Lucas avait déjà sa postlogie en tête, pour laquelle il avait écrit les scénarios. Star Tour 2 était déjà en fonction dans les parcs Disney américains, The Clone Wars était au top et l’univers étendu continuait de se développer, à grand renfort de romans et de comics.
- Lucasfilm se fout de la saga et veut juste faire de l’argent : Faux
Derrière chaque film qui sort au cinéma, il y a toujours des gens qui se défoncent et donnent leur maximum. Mais il faut faire avec des visions, des intérêts et un calendrier qui s’entrechoquent. Le lancement de la nouvelle plateforme de SVOD Disney+ par exemple, influence de nombreux projets.
Bref. Vous l’avez comprit, chacun raconte n’importe quoi pour alimenter son point de vue. Il n’y a plus personne à bord, ça se rentre dedans sans réfléchir une seule seconde à ce qui est dit. On ne se documente pas, on ne vérifie pas, on se contente d’attaquer le point de vue des autres et de défendre le sien.
Le fandom est devenu pour beaucoup une foire d’empoigne digne d’un album d’Astérix.
D’où vient le problème ?
La tension vient de la multiplicité des générations formant le fandom et de leur proportion.
- Nous avons la génération « originelle », qui avait découvert Star Wars au cinéma en 1977.
- Nous avons la génération « Prélogie », qui a vécu la sortie de La Menace Fantôme au cinéma, puis la polémique qui s’en est suivie.
- Enfin, nous avons eu la génération suivante de fans, qui n’a pas eu le plaisir de découvrir les films au cinéma jusqu’à présent et qui s’approprie les films proposés par Disney (et qui a raison de le faire tant que ça ne tourne pas au fanboy), avec cette phrase qu’on lit partout : « Cette trilogie, c’est la mienne !« . Non, c’est celle du genre humain, comme les précédentes.
[Bien évidemment, ces « catégories » n’ont aucun sens et beaucoup ne s’y retrouveront pas, mais ça dégrossit un peu les choses.]
Et dans cette impasse mexicaine, on ne tolère plus rien. On n’écoute personne et on rentre dans la tronche de n’importe qui à grands renforts de réseaux sociaux. On piétine le travail de Lucas pour mettre en avant celui de Disney (c’est complètement idiot) ou on présente la firme américaine comme le démon. Les récentes envies de Disney de bouffer la terre peuvent légitimer cette dernière idée. Mais au regard de son fondateur et de son histoire, c’est parler bien vite tout de même…
Quand tout le monde s’en mêle…
Cerise sur le gâteau, les acteurs eux-mêmes ajoutent à cette pagaille en communiquant maladroitement leurs opinions… ou en remettant directement de l’huile sur le feu.
Mark Hamill :
- Ce dernier avait déclaré être déçu par le traitement de Luke Skywalker dans Star Wars 8. Générant de l’inquiétude chez les fans avant la sortie du film.
- Bien évidemment, il s’est rétracté quelques semaines plus tard.
- Six mois après la sortie du film, il revient à la charge en expliquant ne toujours pas comprendre les choix faits dans ce film… relançant ainsi le débat.
J’adore cet acteur, ne vous méprenez pas.
Daisy Ridley :
Lorsqu’un journaliste lui demande son avis sur les critiques relatives à l’écriture de son personnage, cette dernière répond que ces critiques sont sexistes. Cela n’a rien à voir avec le sujet et ajoute encore à cette tension, où celui qui critique l’écriture d’un personnage (qui est ici féminin) est en fait un mâle sexiste… ce en plein #MeToo ! Les cartes se brouillent donc encore et alimentent les ressentiments.
Simon Pegg :
- Pendant vingt ans, cet homme a tiré à boulets rouges sur la Prélogie et je pèse mes mots…
- Mais il y a quelques jours, ce dernier annonce qu’il manque l’imagination de Georges Lucas aux nouveaux films Star Wars… alimentant encore la polémique dans les deux camps.
Bon, j’adore toujours autant ce mec. D’autant plus que je partage son opinion sur cette dernière déclaration (à lire avant de hurler).
Ajoutons à cela :
- Des chuttas de harceleurs (qui n’ont rien à voir avec le fandom) qui ont littéralement pourrit la vie de certaines actrices,
- Une production qui change constamment son fusil d’épaule au gré du vent (films annoncés puis annulés, séries annulées puis relancées, nouvelles séries annoncées, changements de réalisateurs en plein tournage, bouleversements de calendrier, etc.). Tout ceci nous offre une communication brouillonne.
- Pléthore de Youtubeurs et autres qui ont tous un avis plus débile les uns que les autres sur le sujet et qui attaquent avec une condescendance rare ceux qui ne partagent pas leur opinion (j’ai choisi de ne pas mettre de liens pour ne pas alimenter moi-même la guéguerre),
- Des prises de position de certains médias du fandom eux-mêmes (et des positions fortes !), prises dans des articles ou éditos aux arguments parfois très subjectifs (cristallisant ainsi les frustrations de tous ceux qui ne partagent pas cet avis). Ces derniers étaient pourtant en mesure d’apaiser ce même fandom, mais préfèrent se jeter dans l’arène (pas tous, fort heureusement).
Tout ceci nous laisse à penser que la situation, si elle s’est calmée, reste très explosive.
Il faut dire que c’est inédit, car tout ceci à lieu à l’heure de la communication instantanée, de l’engagement digital et surtout… de la post-vérité ! Chacun réagit donc le plus vite possible, ou sans prendre en compte l’impact de telles déclarations aujourd’hui. Toujours avec cette idée de s’engager et de prendre fermement position.
Lorsque la Menace Fantôme débarqua sur les écrans en 1999, tout ceci n’existait pas. La polémique de l’époque resta donc « interne » au fandom et ne pris pas autant d’ampleur (même si les faits étaient d’une gravité similaire). Je le dis pour l’avoir vécu, comme beaucoup d’entre vous, citoyens.
Certains imaginent sans doutes que prendre la défense de Disney ou de Georges Lucas est un travail vertueux, tant l’entreprise et le réalisateur sont malmenés sur les réseaux sociaux. Je pense même que l’intention de départ est louable, car il s’agit souvent d’une réaction à une attaque précédente… dans un cycle sans fin.
Mais elle ne fait qu’ajouter un pneu de plus dans un incendie (de pneus) qui est prêt à repartir à tout moment.
Le grand retour en arrière
À son paroxysme, cette crise a donné une image catastrophique du fandom Star Wars, digne de l’image du Geek du début des années 90… quel gâchis !
Personne n’a pensé une seconde à la période bénie qui est la nôtre en ce moment. Une période où la pop culture acquière enfin ses lettres de noblesse. Où un fandom passe de « geeks étranges » à « expert d’univers imaginaires ». Une population qui a porté sa passion à bout de bras pour la faire perdurer et enfin permettre au grand public de comprendre tout ce qu’il y a derrière !
Tout le monde a oublié ce que c’était que d’être fan de Star Wars il y a ne serait-ce que dix ou quinze ans. À cette époque, un roman issu de l’Univers Étendu de Star Wars ou de tout autre univers imaginaire était un truc de gamin. De la sous-culture (combien de fois ai-je entendu ce terme) ! Je ne compte plus les personnes ayant levé les yeux au ciel ou me sourire avec pitié lorsque je parlais de Star Wars, de Marvel ou de quoi que ce soit d’autre. M’efforçant à expliquer que Captain America était la personnification de la désobéissance civile (lisez ceci, c’est merveilleux) ou la princesse Leia une représentation remarquablement moderne de la femme dont la société devrait s’inspirer.
Aujourd’hui, le grand public a comprit que la pop culture était une véritable culture, simplement plus accessible. Qu’elle avait de l’épaisseur, qu’elle puisait ses sources dans la grande littérature, dans la philosophie, dans la Mythologie ou la spiritualité. Qu’elle était à même de faire évoluer les mentalités et toute une société, dont elle reflétait les enjeux du moment… et ceux à venir.
Chacun devrait apprécier autant qu’il le peut cette période. Elle ne va pas durer, la saturation guette. Le soufflet va finir par retomber.
Et au lieu de cela, le fandom s’écharpe comme une meute de nerds intolérants. Pire encore, les plus virulents d’entre eux (dans les deux camps) racontent bien souvent n’importe quoi.
Personne n’a tord… mais tout le monde n’a pas raison.
Georges Lucas l’a dit, Simon Pegg aussi, je vais le dire à mon tour :
Star Wars, c’est du cinéma,
Le cinéma est un art,
L’art est subjectif.
Ce n’est pas de la pénicilline, un pacemaker, une arme à feu ou du crack. Ce n’est pas quelque chose qu’on peut considérer comme « bien » ou « mal ». Tout est une question de perception personnelle, avec son background, ses expériences, sa personnalité et son état d’esprit du moment.
On aime ou pas l’oeuvre proposée, point barre. Personne n’a « tord ».
Mais raisonner dans l’absolu et s’en prendre à ceux qui ne partagent pas son opinion… est à la fois débile et condescendant. Ce genre de comportement n’a pas sa place dans un fandom. Tout le monde n’a pas « raison ».
Une opinion… parmi des millions
Personnellement, je rejette toute idée de dogme et j’envoi tout le monde promener. Tout autant ceux qui refusent en bloc ce que propose Disney que ceux qui ne supportent pas la critique relative à ces films.
Car oui, ces films sont critiquables. Et il faut les critiquer, car comme le dit l’adage : La critique constructive est un levier du progrès.
Mais il y a tout de même de bonnes choses à retirer de l’ère Disney. Rogue One s’est avéré efficace, même s’il est également critiquable. Et j’ai une faiblesse pour Solo : A Star Wars Story, qui est à mes yeux le seul véritable Spin-off live jamais porté à l’écran dans l’histoire de la saga. Et lui aussi est critiquable… tout comme la Prélogie… tout comme la trilogie originale.
Personnellement, Star Wars 7 et 8 ne m’ont pas convaincu (notez ma formule). Je n’adhère pas à ce qu’on me propose, pour tout un tas de raisons qui sont légitimes, solides et argumentées.
Mais je comprends tout à fait qu’on ai apprécié ces films. Et les amateurs de la Postlogie ont également des raisons légitimes et solides d’aimer ce qu’on leur propose.
Pourquoi chercher à imposer son point de vue ? Pourquoi faire preuve de mauvaise foi, de condescendance (le mal du siècle) ou pire encore : d’agressivité ? Mon avis n’est pas plus important que celui de n’importe qui… mais pas moins. C’est une simple opinion personnelle. Et nous en changerons peut-être à l’avenir, car rien n’est jamais figé dans nos esprits.
Le fandom va s’apaiser
Scoop du siècle, une grande partie du fandom est en accord avec cette idée simple : la liberté d’opinion. Sur dix débats que j’ai pu avoir sur le Réveil de la Force et Les Derniers Jedi (de véritables conversations, dans la vraie vie), neuf se sont avérés être des échanges d’opinions : détendus et apaisés. Car pour deux fans qui se déchirent sur les réseaux sociaux, des dizaines gardent leur point de vue pour eux et échangent avec calme et ouverture d’esprit.
Il faut que chacun laisse les choses reposer. Ne prenne pas comme une insulte personnelle une opinion différente… et fasse preuve de tact lorsqu’il donne la sienne.
Car un fan de Star Wars aime l’oeuvre dans sa globalité et l’univers de cette saga au sens large, pas un film en particulier. Et c’est cette idée qui doit tous nous rassembler.
Je vous laisse, le Wookie m’appelle !